Ni photogénique, ni sympathique pourrait être le sous- titre de ce billet !Mais, les Ecossais, plus particulièrement les habitants des Iles Shetlands, sont fiers de la présence de ces grands oiseaux sur leurs îles ! D’ailleurs ce sont eux qui leur ont donner ce surnom de « Bonxie » , alors que son nom anglais est Great Skua .
La plus grande partie de la population totale( plus de 50%) des Grands Labbes nichent chez eux !
C'est ainsi que l'on rencontre les Grands Labbes dans la lande !L’histoire remonte au XIXème siècle ! Chassés lorsqu’ils venaient à terre, leurs œufs étaient aussi ramassés pour être consommés et collectionnés, l’espèce était au bord de l’extinction ! En 1831, il en restait 3 couples à Hermaness, au Nord de la plus septentrionale des Iles Shetland !
Quand un propriétaire terrien mit fin à ces pratiques et en 1920 on en comptait 80 couples, aujourd’hui plus de 700.
Avant de rencontrer ces oiseaux, j’avais lu bien des récits les concernant ! Et la confrontation avec la réalité est parfois amusante ! Comme tous les oiseaux, les adultes défendent leur territoire et bien plus encore leur nichée ! Et des récits parlent d’attaque des Grands Labbes face aux promeneurs et randonneurs ! J’imaginais un oiseau aux ailes gigantesques fondant sur moi !
Quand je les ai vus, je les ai reconnus et les ai trouvés moins grands et moins menaçants que dans mon imaginaire ! De loin , on dirait de grosses poules paisibles !
Se fondant dans les couleurs ternes de la lande, l'oiseau passe inaperçu!
Bien sûr c’est un grand oiseau surtout quand il déploie ses ailes ! Son envergure atteint quand même 1,25 à 1,40 mètres. Ce dont on se rend mieux compte quand , pour marquer sa présence, l’oiseau lève ses ailes ! Cette attitude se voit de loin ! Quand un congénère passe à proximité d’un endroit occupé par un grand labbe, celui-ci lève les ailes, histoire de dire, « la place est prise, passe ton chemin » ! C’est aussi un moyen d’impressionner un rival qui a la mauvaise idée de s’approcher de la dame que protège et surveille l’oiseau !
"La place est occupée, passe ton chemin ...et vite!"Le Grand Labbe (Stercorarius skua), est un oiseau qui passe sa vie en mer, vient à terre pour nicher ! Mais contrairement à d’autres oiseaux marins comme les macareux moine, il ne s’installe pas en colonies, c’est chacun pour soi !
Leur mauvaise réputation, provient de leur comportement pour se procurer de la nourriture ! Il attaque bien sûr les plus petits, tels les macareux, mais vole aussi les poissons que d’autres ont pêchés pour nourrir leurs petits ! Il s’en prend aux sternes, aux macareux, aux fous de bassan qui reviennent de la pêche le bec rempli de nourriture pour leur nichée ! Je n’ai jamais vu de ces scènes ! Mais quand un grand labbe se présente au-dessus d’une colonie, tout le monde le chasse, le plus spectaculaire étant la chasse bruyante qu’organisent les sternes ! Mais ils se nourrissent aussi en consommant les lapins qui sont écrasés au petit matin par les rares voitures !
Un bain collectif dans un petit lac!Par contre j’ai vu sur 2 îles différentes de grands rassemblements de Labbes sur des petits lacs ! Les oiseaux se réunissaient là pour se laver ! Ils font alors une toilette minutieuse, comme tous les oiseaux ! Le plus surprenant étant ces groupes de 10 à 30 oiseaux se côtoyant paisiblement, alors qu'à l'habitude , ils se tolèrent très peu!
La goutte au nez: c'est l'évacuation du trop-plein de sel!Un autre phénomène m’intriguait ! J’avais vu plusieurs fois ces grands oiseaux avec la goutte au nez ! Bon le climat est bien humide, il bruine souvent, mais même par temps de soleil, une goutte se forme à la pointe du bec et tombe ! C’est encore un fonctionnement et une adaptation au milieu ! L’oiseau vit en mer, consomme des produits salés et son organisme élimine l’excédent de sel par une glande située dans le nez ! C’est le même principe que l’excroissance du bec du fulmar boréal, dont j’avais déjà parlé
ici !
Envol collectif au bord du petit lac!Quand nous avons rencontrés ces oiseaux, ils n’avaient pas encore de petits et la saison de la nidification en était à ses débuts ! De ce fait nous n’avons pas subi leur courroux ! Sauf une fois et dans une situation assez inexpliquée ! Franchissant le sommet d’une colline, nous sommes passés non loin des « gardiens », 3 oiseaux postés sur la ligne de crête et qui nous ont clairement signifiés d’aller voir ailleurs ! Pourtant, il n’y avait aucune femelle qui couvait ! Peut-être étaient- ils vraiment en poste de surveillance chargés de chasser les intrus ! Nous ne le saurons jamais !
Nous garderons d’eux le souvenir d’une espèce sauvée par la volonté de quelques habitants d’une île lointaine et qui actuellement est toujours protégée, mais en préoccupation mineure.