mercredi 22 juillet 2020

Chelostoma rapunculi : la femelle


Après avoir achevé la publication consacrée au mâle j’ai eu la chance d’observer et surtout d’avoir pu photographier la femelle.
Chelostoma rapunculi femelle dans la fleur de campanule

Mes campanules gantelées poussent tout au fond du jardin soit sous le chêne soit encore plus cachées sous les pittosporums. Il faut qu’il fasse soleil,  que ce ne soit pas trop tôt dans la journée pour que les abeilles s’y retrouvent. Souvent je vois plus de mâles que de femelles et ces dernières ne s’attardent guère. C’est en regardant l’apex de leur abdomen que je repère ces dames. En effet elles s’enfoncent dans la fleur  pour aller y chercher nectar ou pollen.  C’est en voyant qu’elle était bien occupée que j’ai cueilli cette dame dans sa fleur.

Chelostoma rapunculi femelle On voit ses clypeus particulier, ses bandes de poils sur les tergites et on devine la pilosité blanche de sa brosse ventrale

Ensuite pour la voir dans la fleur j’ai détaché la partie supérieure de la corolle.

Dans le jardins il y a 3 Chestoma : rapunculi présenté il y a peu, C. foveolatum  ,et emarginatum qui dort encore sur mon disque dur. 
Mais seule  C.rapunculi et C.foveolatum femelles sont oligolectiques sur les campanules.

Chelostoma rapunculi femelle détails de son abdomen

Or  C.foveolatum n’a pas de bandes pileuses à l’abdomen et ses soies ventrales sont jaunâtres. Tandis que C.rapunculi a des fines bandes  aux tergites et ses soies ventrales qui lui servent de brosses de récolte de pollen, sont blanches.
C’est ainsi qu’en voyant l’abdomen de mon sujet j’étais quasi sûre de voir rapunculi.
Chelostoma rapunculi femelle détail de la face avec son clypeus finement denté

Mais je voulais quand même voir sa tête et elle m’a offert un joli portrait.
On y voit un détail très caractéristique : le  clypéus  très bombé avec de fines dents dans sa partie inférieure.

Chelostoma rapunculi femelle langue sortie pour cueillir le nectar

Cette abeille se nourrit exclusivement sur les campanules, les plus anciennement présentes dans le jardin sont les campanules gantelées.C'est là que depuis plusieurs années ces petites abeilles se nourrissent et prélèvent le pollen pour leurs larves.Elles utilisent des anciennes galeries dans le bois mort.


Chelostoma rapunculi femelle croquant une étamine!
Grâce à notre amie botaniste j’ai aussi semé des campanules carillon, qui sont dédaignées, c’est dommage car on y verrait les insectes dans plus joli décor.


Rappelons que l'abeille fait entre 8 et 10mm, qu'on les voit entre mai et la mi- septembre de l'Afrique du Nord jusqu'au Nord de l'Europe. 
Il faut bien regarder ce qui passe autour des campanules! 

dimanche 19 juillet 2020

Chelostoma ranunculi, le mâle


L es Chelostoma sont de petites abeilles, souvent noires, et qui sont pour beaucoup liées à une plante, en particulier les campanules. D’ailleurs les Néerlandais les appellent « abeilles des campanules ».
Cela fait plusieurs années que lorsque fleurissent les campanules du jardin, j’y trouve des dormeurs .
Chelostoma rapunculi mâle accroché à sa campanule**

C’est donc l’occasion de présenter l’un d’eux.
C’est un mâle. Souvent il passe la nuit dans la fleur et le matin tant que le soleil ne réchauffe pas l’endroit, notre dormeur continue son somme !
Chelostoma rapunculi, vue de face**

Rappel le mâle compte 7 segments au gastre et 13 articles aux antennes.
Les derniers segments de l’abdomen sont caractéristiques de l’espèce. Il faut pour bien voir ces détails trouver un sujet qui veut bien  être sage et se laisser photographier sous tous les angles .

Chelostoma rapunculi, détail de son aile**

Ces abeilles présentent 2 cellules cubitales, la seconde nervure discoïdale aboutit avant la seconde nervure cubitale.
Chelostoma rapunculi, on aperçoit sur le sternite 2, la forte élévation**

Les pattes possèdent entre les  griffes des pulvillus, cette petite excroissance entre les griffes que l’on voit en général facilement.Cette famille a été séparée des Osmie,  pour certains auteurs. 
Chelostoma rapunculi, l'apex du gastre avec ses 3 lamelles**

Après avoir utiliisé  Amiet*  pour trouver le nom du petit mâle qui dormait ce qui fut assez facile puisque c'est  le seul qui a un T7(tergite 7) avec non pas des pointes ou des lobes mais 3 lamelles   , les deux externes sur le même plan et celle du milieu un peu en retrait..L'abeille mesure environ 1 cm .
Chelostoma rapunculi, détail des sternites ,en particulier le second**

Après cela comme je voulais être bien certaine de me trouver avec C. rapunculi, j’ai cherché sa description à l’aide de ce document enespagnol très bien illustré*.
  • Les images permettent de voir le sternite 2 avec son excroissance(photo ci-dessus)
  • Le sternite 3 avec une pilosité latérale sombre
  • Le sternite 4 avec ses 2 lamelles  de couleur claire.
  • Le sternite5   couvert en partie par des poils blonds longs et ondulés.

Chelostoma rapunculi, des annotations pour s'y retrouver!**

 Ces détails donnent la détermination exacte de C. rapunculi.

Cette abeille, la femelle plus particulièrement est oligolectique sur les campanules, en particulier la campanule gantelée très présente dans le jardin et ce depuis longtemps puisque cela fait plusieurs années que je vois cette abeille. 
Chelostoma rapunculi, le mâle**

La femelle est bien plus difficile à voir, elle ne s’endort pas dans la fleur .
Elle installe ses œufs dans des galeries de bois mort en séparant les cellules avec du mortier et en rebouchant solidement son travail.C'est elle qui butine strictement sur les campanules , les mâles parfois se promènent sur d'autres fleurs je les vois parfois sur la lavatère ponctuée.
Jamais je en suis arrivé à trouver un des endroits  où la femelle construit ses alvéoles!Elle ne présente qu'une génération par an et on les voit du moi de Mai à celui d'août.


*Document en espagnol
**Image grossie 3 fois

jeudi 9 juillet 2020

Hoplitis cristatula mâle: le long cheminement pour arriver à son identité!


Pour observer les insectes il faut de la patience. Patience de les voir se poser, de prendre le temps de la photo. Puis patience de chercher les critères visibles pour déterminer qui est sur l’image.
Mais il faut aussi de la constance. D’une année à l’autre dans les mêmes endroits, sur les mêmes plantes on rencontre les mêmes espèces. Mais parfois , elles ne se ressemblent pas vraiment . Alors se reposent de nombreuses questions et les recherches qui s’en suivent.
L’explication : chez les hyménoptères,  mâles et femelles ont une apparence différente.
C’est  ce qui m’est arrivé avec ce mâle d’Osmie qui m’a donné bien du fil à retordre !

En 2018 j’ai observé Hoplitis cristatula femelle,  cette belle découpeuse des pétales de lavatère ponctuée. En 2019 aussi, et cette année sa descendance est toujours à l’œuvre dans le jardin.

Toujours en 2018, j’avais photographié un mâle (13 articles aux antennes,  7 segments abdominaux) avec les derniers tergites particuliers.

Joli mâle à l'abdomen terminé par deux lobes, de la famille des Osmies (Hoplitis) , mais lequel?

Il faut savoir que chez certaines espèces, les derniers tergites des mâles sont bien différents et donnent  (en partie) l’identité du sujet.
En utilisant la documentation à ma disposition et les photos faites j’étais persuadée d’avoir vu Hoplitis papaveris.

Vue des derniers tergites si particuliers de cette abeille de la famille des Osmies (70 environ en France) 

Pourquoi ?

Dans  Fauna Helvetica 9 où sont étudiées les Osmie, par  Amiet , lorsque je suis le cheminement de la clé, ayant vérifié au préalable que l’abeille a 2 cellules cubitales aux ailes et un pulvillus aux pattes, j’arrive tranquillement à Osmie papaveris, la seule qui possède un tergite 6 avec 2 dents latérales et le tergite 7 avec 2 lobes ! 

Joli popotin bien visible quand l'abeille a le nez plongé dans la fleur!

Mais ce que j’ignorais c’est que cette clé étudie les espèces suisses(47) et s’il y des vallées très agréables dans ce beau pays, nous ne sommes pas au bord de la Méditerranée. Or chez nous il y a davantage d’espèces  et certaines que l’on ne rencontre pas en Suisse.

D'autres  détails significatifs se trouvent sur la face ventrale de l’abeille. Or dans une situation normale, on ne la voit pas.

Vue latérale du mâle Hoplitis cristatula, on voit ses grosses mandibules.

J’ai trouvé ensuite un texte de Benoist* consacré aux Osmies de la Faune française, l’étude porte sur 70 espèces et propose une clé.

Début juillet , j’ai eu la chance de trouver un de ces mâles sur une catananche bleue et pas bien réveillé, je l’ai transporté sur ma table de photographie. Il me faudra bien du temps pour le chatouiller et le convaincre de me montrer sa face ventrale et les quelques photos faites sont parlantes.

Ce dormeur s'est trompé de fleur: les copines sont sur les mauves et les lavatères!

Que faut-il regarder ? les 3, 4, 5 èmes segments abdominaux.
Dans notre sujet, le 4ème est fortement échancré et cilié, le 5ème  plus faiblement sinué.
Voici les éléments de la clé qui ont permis de progresser.
  • le 7éme segment est émarginé avec 2-4dents ou lobes
  • le 6éme segment dorsal porte de chaque côté une dent
L'abdomen de notre dormeur

  • le 4 ou 5ème segment ventral  ou les deux, sinués au bord postérieur, le 7éme bilobé
Abdomen d'Hoplitis cristatula mâle: on voit le sternite , très sinué et cilié

  • mandibules à dent terminale très longue égalant le tiers de la longueur de la mandibule, 4éme segment ventral échancré et longuement cilié, le 5éme non cilié, légèrement échancré = cristata.

Hoplitis cristatula mâle :une mandibule avec une dent bien longue.

Anciennement appelée Osmia cristata, aujourd‘hui  Hoplitis cristatula, voici donc identifié ce mâle bien présent dans le jardin. Ce n'est pas étonnant puisque la femelle se voit toujours en train de découper les pétales des lavatères ponctuées. Même si je ne la vois pas tous les jours "au travail", le résultat est visible sur les fleurs.

Pour mémoire, Hoplitis papaveris a les sternites 4 et 5 échancrés et ciliés et la dent terminale des mandibules plus courte.

Bibliographie