samedi 28 septembre 2013

Protapion apricans, petit Apion dans les fleurs du trèfle des prés.


Voici un tout petit coléoptère. Dans la nature je ne pense pas que je l’aurais aperçu tant il est minuscule : autour de 2 mm.  Je nourris mes pensionnaires avec les plantes sur lesquelles je les trouve. Ainsi dans une boite avec des punaises fournies en diverses fleurs, j’ai vu  se promener ce coléoptère. Parmi les fleurs il y avait du trèfle des prés : Trifolium pratense. Vous savez combien cela aide à déterminer les insectes car souvent ils sont intéressés par une variété de plantes.
Protapion apricans, 2 mm, perdu dans la fleur de trèfle


D’ailleurs lorsque je lui ai offert une fleur bien fraîche de trèfle, ce Protapion apricans n’a pas hésité.

Ce coléoptère appartient à la famille des Apionidae qui est une sous famille des  Curculionidae .
 Comment les reconnaitre  ?

 La grande différence se trouve sur les antennes : celles des Curculionidae sont bien coudées, celles des Apions sont beaucoup plus souples et pas coudées, même si pour tromper les observateurs, l’insecte peut les tenir coudées. C’est d’ailleurs ce qu’il a fait lors de ma première observation.
D'autre part, leur taille est inférieure à 3mm.
Protapion apricans buvant dans une goutte d'eau, on note les antennes très souples qui ne sont pas coudées.

Avec ses pattes jaunes et son corps noir il se voit une fois qu’on l’a repéré. Je pensais qu’il  serait facile à identifier mais j’ai vu qu’il y en avait plusieurs avec ces caractères. Les Apions sont environ 400 dans nos régions. Mais quelques détails aident à faire la différence pour arriver à notre détermination de Protapion  apricans

Alors voyons les détails :

  • Tous les fémurs sont jaunes et les tibias sont noirs sauf le premier qui est légèrement éclairci.
  • Les antennes aussi sont noires sauf le scape et les premiers articles du funicule.
On voit bien le contraste entre le corps très noir et les pattes jaunes.
 

 Un détail me manquait, il s’agissait de vérifier que  la hanche et le trochanter de la première paire de pattes soient bien jaunes. Or, d’habitude les  charançons une fois sur le dos, se tiennent tranquilles pendant quelques instants, le temps d’en faire des photos.
Protapion apricans, la flèche indique la hanche  et le trochanter jaune .
 
 Cet insecte est tout différent, je n’en ai jamais un gesticuler ainsi, je n’avais quasiment jamais le temps de mettre au point qu’il était déjà sur ses pattes et cavalait dans tous les sens. Il faut vous dire que pour  voir les détails il faut grossir entre 2 et 3 fois et faire la mise au point manuelle.
Dans l'inflorescence du trèfle,  Protapion apricans
 
Quel est le cycle de vie de ces minuscules insectes? Les adultes sont visibles en été. La ponte a lieu dans le capitule floral et les œufs,  puis les larves se développent dans une gale où ils passent l'hiver.

 
 
Le pronotum , fortement ponctué et des élytres striées montrent la "finition " extrêmement soignée de l'insecte. On aperçoit même un sillon sur le milieu du pronotum. Ce n'est qu'en grossissant au moins 3 fois l'image que l'on peut avoir une idée de tous ces détails. Les descripteurs utilisaient loupe et microscope  sur des insectes préparés pour ces observations. C'est bien plus difficile quand il faut avec l'objectif suivre une petite bestiole gesticulante!
 Protapion apricans est présent dans toute l'Europe, très répandu sur les fleurs de trèfle des prés.

jeudi 12 septembre 2013

Strictopleurus abutilon : larve stade V se nourrissant d’une graine.


J’aurais pu mettre un titre moins sérieux , mais de circonstance : « Bébé punaise » prend son biberon !

J’élève en ce moment une larve de punaise Stictopleurus abutilon. Je l’ai « recueilli » au stade IV, elle vient de passer au stade V . Je comptais vérifier qu’elle soit bien Stictopleurus abutilon en attendant sa dernière mue.

Mes pensionnaires ont droit à la nourriture adéquate après mon petit déjeuner !  Je voulais faire quelques images du stade V  de la larve de punaise et je lui ai mis à disposition, pour obtenir ses bonnes grâces, une fleur et des graines de Picris fausse vipérine.

Et j’ai eu droit à un spectacle inédit et fort plaisant.

Stictopleurus abutilon confortablement couché,  tient fermement la graine entre 4 pattes.

La larve s’est saisi d’un petit groupe de graines et pour pouvoir goûter celle qui lui plaisait , et  m’a offert un spectacle digne d’un numéro de jonglage. Le plumet de cette graine est très encombrant et tout à fait gênant pour atteindre la partie charnue et comestible. Couché sur le dos, s’aidant de ses  6 pattes, elle a manipulé la graine dans tous les sens avant de la positionner correctement.

J’ai observé cela en grossissant la scène entre 2 et 3 fois et positionné à moins de 5cm de l’insecte qui gigote dans tous les sens, ma faible profondeur de champ est un handicap.

Je précise que la larve fait entre 6 et 7 mm.

La première photo montre la larve, couchée sur le dos, tenant fermement sa graine avec 4 pattes. Le rostre est au repos bien placé sur l’abdomen.
Le rostre bien rigide   perfore la graine

Ensuite il y a deux phases distinctes. Une graine est relativement dure à percer. Le rostre bien pointu à son extrémité sert à percer la graine, le rostre reste tendu. C'est la première phase.

Ce rostre est la transformation des pièces buccales adaptées pour sucer les aliments. La partie la plus rigide est en plusieurs éléments, c’est une sorte de gouttière qui contient un tube complexe qui sert à aspirer la nourriture.

Phase2 : on aspire la substance nourricière contenue dans la graine: Bébé et son biberon.

Lors de la phase deux,  l’insecte  pompe , aspire le contenu de la graine et on voit alors un conduit, plus souple qui bouge légèrement. Lorsque l’insecte s’approche de la graine, la gouttière rigide se plie selon les articulations visibles sur les photos plus loin.

Ne dirait-on pas alors un bébé couché qui tient fermement son biberon tout en gigotant joyeusement. C’est cette scène qui m’a donné l’idée de partager avec vous ces images !!

1: le tube aspirant la nourriture 2: la gouttière articulée et rigide qui le soutient

Lorsque la larve a fini de consommer ce qui lui convient dans la graine, elle la vire en lui ajustant un magistral coup de pied du droit dont certains de nos footeux feraient bien de s’inspirer pour être plus efficaces. Hélas ce fut bien trop rapide pour une photo !



Bon, la voilà restaurée notre larve me suis-je dit. Eh non, une seconde graine lui fait envie et cette fois c’est dans la position assise sur les fesses que l’insecte continue son biberonnage !

Les pattes arrières servent d'appui, celles antérieures tiennent la graine(Phase 1)

Le tube aspirateur est lui-même complexe car il envoie de la salive dirons-nous dans la graine pour la liquéfier et ensuite l’aspirer plus facilement, il y a donc deux canaux dans ce tube.

Stictopleurus abutilon junior  siphonne sa graine , les antennes couchées en arrière, paisible!(Phase 2)


Les deux phases se répètent et le nourrissage est un exercice patient ! Les deux séquences auront duré plus de 20 minutes.

La flèche montre le point de départ de la gouttière , bien en arrière de celui du  canal souple qui aspire la nourriture.

Observer les insectes dans les petits détails de leur vie réserve bien des surprises !
Si vous voulez mieux connaître l'adulte c'est ici

 

samedi 7 septembre 2013

Buprestis octoguttata , le Bupreste à huit taches


Observant les insectes sur les bords d’un mince cours d’eau presque à sec en cette fin d’été encore très chaude, je me disais en moi-même que je ne voyais aucun coléoptère, tout en scrutant les touffes de lavande desséchées ou la sarriette en fleurs.

Le croirez-vous ou non, voilà que ce Bupreste vient littéralement à moi. Il se pose sur mon pantalon, explore mon tee shirt avant de se caler sur mon appareil photo ! La signification était très claire ! Il a eu droit à sa séance photo pour passer  à la postérité.
Bleu très sombre avec des belles "gouttes" rondes sur les élytres, voici Buprestis octoguttata

Buprestis octoguttata ressemble beaucoup à Buprestis novemmmaculata rencontré dans un biotope semblable. Il est  très foncé, apparaît noir alors que c’est bleu foncé et les taches sont jaunes très claires.

Vous remarquerez que le déterminateur, Linné,  parle ici de guttata et non de maculata. Les taches de notre insecte sont en effet plus régulières et de forme plus arrondie que celles de maculata.
Il est un tout petit plus petit, il fait entre 9 et 14mm.



Buprestis octoguttata à 8 taches rondes  sur les élytres et deux allongées latéralement

Il existe aussi  d’autres petites différences,alors voyons les caractéristiques de ce beau coléoptère. Il compte 10 taches sur les élytres, 5 sur chacune d’elles. Les 4 grosses que l’on voit bien et une latérale allongée en haut  au niveau de l’épaule. Ce qui nous fait bien 10 taches pour un insecte appelé Bupreste à 8 taches !!

 
Des taches claires sur l'abdomen

La tête ne comporte qu’une tache sur le bord des yeux.

Le pronotum porte une tache latérale qui ne s’étend pas comme chez novemmaculata.
Buprestis octoguttata, les ailes membraneuses sombres servent à voler avec aisance.

 
Le dessous du corps est aussi taché de jaune sur les segments abdominaux.
Le dessus des élytres est fortement strié, l’apex des ceux-ci tronqué et bidenté.

L'apex des élytres de Buprestis octoguttata est tronqué et bidenté.

Buprestis octoguttata  se voit sur les branches vertes des pins, ses larves sont dans les troncs et les racines des pins récemment morts sur pied.
On le rencontre dans une grande moitié sud , et dans certaines zones très boisées comme les Vosges, essentiellement pendant l'été.
Pour relire la page consacrée à Buprestis novemmaculata c'est ici
Et pour les comparer facilement les voici artificiellement côte à côte.
Buprestis octoguttata (à gauche) et Buprestis novemmaculata
                                Buprestis octoguttata (à gauche) et Buprestis novemmaculata





vendredi 30 août 2013

Arge pagana, mangeuse des feuilles du rosier


Il s’agit de présenter le devenir de ces petites et amusantes larves d'Arge pagana vues au stade 2 puis en train de passer au stade 3 sur les 2 messages précédents.

En fait mon histoire commence au mois de juillet de cette année.

Larve d'Arge pagana au dernier stade

Le 23 juillet, j’observe une fois de plus que les feuilles de mon rosier sont réduites, pour certaines à l’état de squelette. Je décide de chercher le nom de ces voraces.

Je prélève quelques- unes des larves au dernier stade et les nourris avec des feuilles de rosiers tout en observant ce qui se passe. Je n’ai pas trop longtemps à attendre. Une semaine plus tard je ne trouve plus que de petits cocons blancs et soyeux au fond de mon bac. Voilà donc comment elles disparaissent des rosiers. En fait, elles descendent vers le sol et se nymphosent au sol, sans doute cachées dans la végétation.

Cocons d'Arge pagana


 Je pensais que mes mangeuses de feuilles de rosiers étaient des Tenthrèdes, des mouches à scie de la famille des Symphytes.  Je m’apprêtais à attendre le printemps prochain pour connaître le nom de l’insecte. La patience est nécessaire avec ce petit monde.

 Quand à mon retour de quelques jours de vacances j’ai trouvé un insecte mort dans mon bac après seulement une douzaine de jours de vie dans le cocon, zut, me suis-je dis, un des cocons était parasité par une mouche. J’ai regardé l’insecte de plus près et j’ai compté  4 ailes. Ce n’était pas un diptère mais bien le locataire du cocon qui était devenu adulte.
Femelle Arge pagana en ponte

J’ai eu le réflexe d’aller voir mon rosier dans le jardin  et là aussi j’ai vu un adulte stationner sur les feuilles

Arge pagana ne fait pas partie des Tenthrèdes mais de la famille des Argidae qui se reconnaît à la particularité de ses antennes : l’article 3 est très très long.

Dans la famille des Argidae,  Arge pagana est facile à reconnaître, l’hyménoptère est tout noir : tête, ailes , pattes, thorax, seul l’abdomen est jaune orange. Sa taille est d’environ 1cm . L'adulte permet de bien voir le troisième article de l'antenne , très long, les deux premiers sont très courts.

Quelques jours plus tard je vois un autre adulte sorti d’un des cocons.

Je constate que la durée de la nymphose varie grandement. Lorsque j’ai vu le premier adulte né après une dizaine de jours seulement j’ai eu la curiosité d’ouvrir  un autre cocon, voici ce qu’il contenait , une larve bien rétrécie  mais pas transformée.
Larve dans le cocon
 Deux jours plus tard après la naissance du second adulte j’ai ouvert un autre cocon et là j’ai vu un insecte à moitié formé.
Dans le cocon imago encore incolore .
La durée de métamorphose de ces larves en insecte adulte est variable. Voilà un premier constat. Bien sûr mes observations n’ont rien de scientifiques, je fais des observations sur quelques individus que je prélève dans mon jardin !


La suite de l’histoire se passe sur le rosier.  On peut dire que la bestiole a de la suite dans les idées. Je verrais tous les jours un ou deux adultes sur le rosier. Ayant observé le soir un adulte en ponte sur une tige je l’ai retrouvé au matin à proximité de cette tige.

En ponte, rien ne dérange l’insecte. J’ai observé sur le rosier Arge pagana en train de pondre. J’ai bougé la tige pour la rapprocher de mon objectif, je l’ai coupé pour la mettre dans une position mieux éclairée et finalement je l’ai emporté sur ma table de travail. Jamais l’hyménoptère ne s’est laissé distraire de sa tache de reproductrice. Quand j’ai eu fini mes observations je l’ai mise à l’abri dans un bac et encore là l’infatigable pondeuse est restée en place. Ce n’est que le matin suivant que je l’ai vu quitter la tige  porteuse de ses œufs.

Comment fait-elle pour pondre ses œufs à l’intérieur de la tige du rosier ?

Arge pagana incisant la tige du rosier avec sa "scie", méritant ainsi le surnom de "mouche à scie"

D’abord elle choisit  un endroit de la tige proche des feuilles terminales, là où elle est la moins dure et où les jeunes larves trouveront des feuilles tendres pour se nourrir. Elle choisit toujours le côté de la tige tourné vers le sol, là où son travail est le moins visible.

J’ai essayé de rendre en photos les 2 étapes du travail
Détail montrant l'outil en fonctionnement.

En premier la partie terminale de l’abdomen  « incise » la tige, c’est avec la scie que je n’ai eu l’occasion de voir qu’une fois . C’est relativement court.
Toujours en ponte, la flèche indique une précédente ponte d'Arge pagana
Puis la seconde phase la plus longue consiste en la ponte proprement dite. Le dernier segment de l’abdomen se relève et on voit un tube fin, l‘ovipositeur qui s’enfonce dans la lige et un liquide gélatineux recouvre la tige. Extérieurement on voit ensuite un trait fin sur la tige.
La flèche indique l'oviducte qui injecte par des contractions les œufs dans la fente préparée par la "scie"

Au fil des jours ce trait grossit, la tige enfle puis les deux lèvres de la tige s’écartent laissant apparaître les œufs. Autre moyen d’identifier Arge pagana : ses œufs sont disposés en 2 rangées parallèles et non en quinconce comme  Arge  ochropus(qui lui ressemble ).
Au bout de quelques jours les œufs sont bien visibles.

Au bout d’une dizaine de jours encore une fois les œufs donnent naissance aux larves.

Aux premiers stades elles sont translucides, on les voit très peu sur les feuilles et les tiges des rosiers..

Larve nouvelle née, elle est entièrement translucide, sa tête va se colorer au fil des heures Observez sa taille sur la tige du rosier, difficile à voir!



C’est en ce moment que la seconde génération est à l’œuvre, c’est la dernière pour cette année. Les larves sont visibles jusqu’en septembre et sans doute même plus tard pour certaines. J’en vois tous les ans à ces périodes. Elles se nymphoseront et passeront l’hiver au sol pour reprendre leur développement au printemps prochain.

La question que l’on peut se poser : comment s’en débarrasser ?

 Cela fait des années que j’en vois sur mes rosiers qui se portent toujours bien. Je secoue les feuilles quand je vois beaucoup de larves et elles vont nourrir les poissons. De toute façon je taille assez régulièrement les rosiers et ils se portent bien. Je n’utilise pas de produits chimiques.

lundi 26 août 2013

Arge pagana : mue de la larve


J’ai assisté au passage de la larve d’Arge pagana du stade 2 au stade 3.

Cela ne dure qu’une dizaine de minutes. Je continue à observer les larves d’Arge pagana qui sont installées sur mon rosier. Et cette après –midi j’en ai vu une un peu bizarre trop claire à l’avant et trop sombre à l’arrière. Ayant compris ce qui se passait, j’ai prélevé la feuille sur laquelle elle se trouvait, l’ai installée sur ma table de travail, changé d’objectif et j’ai eu la chance de pouvoir photographier la fin de cet instant particulier qu’est la mue.
Arge pagana, une larve avec 2 têtes, une vieille colorée et une neuve toute claire

La larve fait glisser son ancienne enveloppe tout en se déplaçant. Les vraies pattes à l’avant du corps sont déjà dégagées. Petit à petit ses fausses pattes se dégagent.
On voit l'ancienne enveloppe bien raccourcie, on distingue la tête, les pattes vraies et fausses..

Quand la vieille peau est repoussée vers la partie terminale de l’abdomen cela devient amusant car l’insecte dresse l’abdomen en l’air et le secoue vigoureusement pour faire tomber l’enveloppe devenue trop petite !  Cela dure 2 minutes ! La  voilà libre.
La larve continue à se déplacer en faisant glisser la vieille peau vers l'arrière.

Vous remarquerez que la larve manque de couleurs, cela ne viendra que petit à petit. Elle fait maintenant 11 mm. Au second stade c’était entre 7 et 8mm.
On distingue bien les fausses pattes libres maintenant

Je tenais à partager avec vous cette séance que l(‘on a peu l’occasion de photographier.

Le moment le plus amusant: on secoue l'abdomen tenu en l'air pour faire tomber l'ancienne enveloppe.


Nous y voilà presque!



Voilà la larve débarrassée de sa vieille peau, enfin!



Au stade 3 Arge pagana, mais pas encore colorée