Episode 1
Dans la garrigue qui fait partie de mes parcours préférés je
rencontre sur des lavandes un gros insecte noir et lourdaud. Je pense alors à
un Meloe avec ses élytres tronqués et son abdomen surdimensionné. L’insecte
mesure environ 12mm .Mais comme je vois un trait brun le long des élytres je me
dis qu’il s’agit sans doute d’une espèce particulière de Meloe. J’en vois
plusieurs et certains en couple perchés
en haut de brindilles. Le mâle (7mm) comme souvent est plus beaucoup plus petit
que la femelle. J’en reste à mon idée première et je pense toujours avoir vu
des Meloe.
![]() |
Un gros coléoptère noir aux élytres qui ne recouvrent pas l'abdomen, se déplace sur une tige. |
Fin du premier épisode.
Episode 2
Pendant l’hiver 2010-11, je mets de l’ordre dans mes
dossiers et je vérifie l’identité de mon coléoptère. Ce n’est pas un Méloe. Les
recherches commencent.
![]() |
Couple d'Arima marginata, le mâle bien plus petit que la femelle. |
Après un passage par Insecte.org (le forum), j’en arrive à Arima.
Arima fait partie de la grande famille des Chrysomèles qui
sont souvent des insectes aux couleurs brillantes et vernissées. Celle-ci fait
exception ! J’apprends qu’elle appartient à la sous- famille des Galerucinae.
Mais deux candidats se présentent quand il faut lui attribuer
son nom propre : est-ce Arima marginata ou Arima maritima ?
![]() |
Arima marginata avec sa côte bien marquée sur l'élytre. |
La présence le long de l’élytre d’une côte que l’on voit
bien sur les photos nous oriente vers marginata. C’est aussi l’espèce qui est
la plus documentée .Pourquoi ?
Cet insecte se nourrit sur les plants de lavande, sauge, hysope, les plantes à parfum en général. C’est d’ailleurs comme ravageur de l’hysope qu’elle a été connue sur
les hauteurs de Nice. C’est aussi dire que c’est un insecte que l’on rencontre
en Provence essentiellement.
L’insecte est identifié : fin de l’épisode 2.
Episode 3
Nous sommes maintenant au printemps 2011 et je cherche des Arima
pour essayer de trouver des individus sans côtes qui appartiendraient alors à
la sous- espèce maritima, plus précoce.
Mes recherches dans ce domaine seront sans succès. Ma première
rencontre avec Arima a lieu le 6 Mai, c’est toujours marginata avec sa côte
latérale du pronotum présente.
Je vais en rencontrer ensuite en divers endroits, sur de la
sauge dans le département voisin du Var, puis sur de la menthe.
![]() |
Couple d'Arima marginata perché au bout d'une inflorescence de sainfoin. |
Je pense que seule marginata est présente dans ma zone.
Fin de l’épisode 3.
L’automne arrive puis l’hiver et comme beaucoup j’en profite
pour mettre à jour mes dossiers, identifier les inconnus rencontrés pendant les
sorties printanières et estivales..
![]() |
Larve Arima marginata vue en avril 2011. |
J’avais en avril, puis en mai photographiés des
« chenilles toutes noires ». Mais en regardant dans la documentation
je n’ai pas trouvé de correspondance. Ces chenilles avaient aussi un manque
important : elles n’avaient pas de fausses pattes. C’est en relisant un
texte sur le ravageur des plantes à parfum aromatiques et médicinales (PAPM)
qu’est Arima marginata que le déclic s’est fait ! C’est une larve d’Arima
marginata que j’ai vu. En fait il y en avait plusieurs, elles étaient au pied
de certaines plantes de lavandes encore bien peu développées à cette altitude
de plus de 1000m.
![]() |
3 paires de vraies pattes(1) et pas de fausses pattes sur l'abdomen,et une pseudo patte anale(2) |
Plus tard, à une altitude moins élevée (800m) j’en ai vu sur
des fleurs de thym .C’est bien sûr au stade larvaire que ces Arima sont les
plus nuisibles aux cultures. L’insecte adulte passe plus de temps à se
reproduire qu’à se nourrir.
![]() |
Chenille de Gazé avec ses vraies pattes (2)et ses 5 paires de fausses pattes (1): voilà la différence avec une larve d'Arima |
Comment distinguer une larve d’une chenille de papillon ?
La chenille a des fausses pattes situées à l’arrière du corps (5 paires pour beaucoup de papillons), la larve d’Arima
n’a que des pattes ( 3 paires comme tous les insectes)et une pseudo patte anale
qui lui sert à se maintenir sur la plante.
C'est donc à la fin de l'année 2011 que la boucle a été bouclée !
Fin de l’épisode 4.
Arima marginata au stade larvaire est polyphage et consomme
des feuilles de lavande, sauge, menthe, mais aussi camomille et fait des
ravages dans ces cultures. Je n’ai jamais approché de zones cultivées et toutes
mes rencontres se sont faites très loin de ces zones, l'insecte est donc bien présent dans la garrigue .
J’ai bien sûr dans le jardin thym, lavandes, sauges et
camomille mais je n’ai jamais trouvé d’Arima sur mes plantes, heureusement pour
elles ! L’insecte est restreint aux départements
provençaux et aux voisins italiens.