Suite de l'article précédent intitulé :la vie d'une bourgade d'abeilles solitaires , les Halictes
Le matin du 15 août, tout a changé: dans les trous j’ai vu d’autres têtes sortir le nez.Des têtes
plus étroites avec des antennes plus longues !!Les mâles
émergeaient !
Lasioglossum nigripes mâle frais émergé |
Il y en avait beaucoup, l’un sortant du trou, poussé par le
suivant. Certains plus prudents que d’autres faisaient marche arrière quand je
regardais, d’autres attendaient que je regarde ailleurs pour sortir, jeter un
œil rapide et s’envoler !!
Puis dans une deuxième phase, j’ai vu des mâles revenir,
rentrer dans un trou, puis quelques instants plus tard en ressortir et illico
rentrer dans une entrée voisine.
Lasioglossum nigripes mâle premier un regard sur le monde extérieur |
J’ai aussi vu deux mâles s’empoigner et se rouler dans le
sable.
Puis une femelle sortir d’un trou suivi d’un mâle tous deux
faisant un brin de toilette.
Lasioglossum nigripes mâle et femelle |
Encore plus tard un mâle attraper une femelle et ne pas la
lâcher jusqu’à ce qu’ils roulent dans la boite que j’avais placée à l’aplomb du
mur !
Vous avez compris : la nouvelle génération pense au
futur ! Il s’agit d’assurer la pérennité de l’espèce !!
Le couple qui avait roulé dans ma boite me permet de les
photographier en gros plan et surtout de
rechercher les détails qui permettent une identification quasi certaine.
Lasioglossum nigripes mâle |
On note des différences importantes entre mâle et femelle. Voyant
du rouge sur l’abdomen du mâle, j’ai été très contente, pensant à tort arriver
facilement à mettre un nom sur l’espèce ! Hélas non, chez les Evylaeus il
existe plusieurs mâle à abdomen rouge (Lasioglossum (Evylaeus) calceatum, Lasioglossum
(Evylaeus) albipes).
Lasioglossum nigripes femelle( noter la présence d'acariens sur le thorax) |
L’observation des femelles avec le dernier tergite fendu
m’avait orienté vers les Halictes.
L’absence de pubescence feutrée au bords des tergites indique les
Lasioglossum. C’est ensuite que cela se complique. Je vais m’orienter vers le
sous groupe des Evylaeus.
Il me faudra observer plus en détail le mâle qui présente un labre et des mandibule noires.
Lasioglossum nigripes mâle, labre et antenne à observer |
Détails que l'on voit mieux sur la photo suivante.
Lasioglossum nigripes mâle, détails de la tête |
Le 3eme article de l'antenne plus court que les suivants est aussi un critère relévé par le document* qui me sert de clé.
Les pattes noires amènent aussi vers L. nigripes qui porte alors bien son nom.
Mais un autre détail difficile à voir me confortera dans mon idée: de fines rayures se trouvent sur la partie déclive du tergite 1 visibles sur les photos ci-dessous.
Détail du premier tergite montrant les fines rayures caractéristiques de l'espèce L. nigripes |
Et encore davantage en grossissant plus .
Fines rayures de la partie déclive du 1er tergite |
Il s'agit bien d'une colonie de Lasioglossum nigripes qui s'est développée dans ce petit morceau de jardin.
Il me reste cependant de nombreuses interrogations après cette détermination.
Je vois de nombreux mâles à tout moment de la journée autour des trous de sortie. Est-ce qu'ils se nourrissent?
Lasioglossum nigripes mâle se nourrissant sur une fleur de fenouil |
La réponse se trouve sur des images de l'année précédente. Nos mâles font le plein d'énergie sur les fleurs riches en nectar comme celles du fenouil!
Lasioglossum nigripes mâle détail de la langue |
Que deviennent les femelles fécondées issues de la seconde génération?
Ce sont les futures reines fondatrices d'une nouvelle génération au printemps prochain. En attendant elles passent l'hiver dans leur nid.
Progressivement les entrées ont été abandonnées, elles sont restées ouvertes quelques temps puis se sont bouchées et je ne vois plus aucune activité sur la zone depuis un bon mois, de temps en temps quelques grains de sable semblent rouler .
Je dois avouer que c'est avec un petit pincement au coeur que j'ai vu ces actives butineuses peu à peu disparaître de la zone. J'espère qu'elles passeront un bon hiver pour être prêtes au printemps à virevolter sur nos fleurs!
* Pour identifier ces belles abeilles je me suis servie de Clés illustrées pour l'identification des abeilles de Belgique et des régions limitrophes Halictidae, Alain Pauly
Pour en savoir davantage sur la vie en société de certaines Halictes, un extrait de : La Biologie des abeilles primitives / par C. Plateaux-Quénu,
1972